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29 décembre 2012 6 29 /12 /décembre /2012 22:28

En ce 27 janvier 1671, La Fontaine reçoit les premiers exemplaires de son troisième tome des contes libertins dont son imprimeur a achevé l'impression. Chut ! Ne le répétez pas aux enfants, mais dans le fabuliste sommeille un sacré cochon. Il ne se contente pas d'écrire des fables mettant en scène des animaux pour l'instruction du Dauphin, il rédige également des contes licencieux avec comme prétexte de dénoncer l'hypocrisie de son siècle. Surtout celle des gens d'Église qui baisent et foutent allégrement malgré leurs voeux de chasteté. Comme à son habitude, il pioche son inspiration dans les auteurs anciens, Boccace et bien d'autres. Il pille allégrement le recueil des Cent nouvelles nouvelles (fabliaux du XVe siècle). Entre 1664 et 1666, il publie ses premiers Contes et nouvelles en vers libertins rassemblés en deux tomes. Puis il enchaîne en 1668 avec la publication de 128 fables animalières de la plus haute décence.

 

Avec ses contes libertins, ne vous attendez tout de même pas à lire du Georges Bataille avant l'heure. Le subtil La Fontaine manie sa plume avec légèreté, il trousse les vers avec délicatesse. Point de graveleux, point de pornographique. Au point qu'un lecteur non averti n'y verrait que du feu. Il faut "dire sans dire". C'est le prince de la métaphore pour contourner les mots condamnés par la bienséance. Pour évoquer le pénis, il fait appel au serpent. Et pour que son lecteur comprenne bien la métaphore, il ajoute l'adjectif maudit, lui signifiant ainsi que le mot serpent est "mal dit". La Fontaine n'utilise pas la triviale expression "faire l'amour", mais "le diable en enfer". Le diable étant le sexe masculin, et l'enfer, bien entendu, le sexe féminin. Ainsi voile-t-il chaque mot trop explicite d'une gaze parfois opaque, parfois transparente.

 

Les histoires de cocuage constituent son fonds de commerce. Tel le conte de La Mandragore qui met en scène Callimaque amoureux de Lucrèce, l'épouse de Nicia Calfucci, un Florentin. Malheureusement, il a affaire à une épouse fidèle qui repousse tout amant, alors Callimaque élabore un stratagème machiavélique : il fait croire au mari, qui se désespère de voir sa femme ne pas lui donner d'enfant, qu'il connaît un remède secret. Celui-ci consiste à faire boire à Lucrèce du jus de mandragore. Mais le fourbe prévient : le premier homme qui caressera Lucrèce après l'absorption de la potion tombera raide mort. Le mari doit donc trouver une bonne âme pour essuyer les plâtres. La suite, on la devine : Callimaque se déguise en meunier pour se glisser dans le lit de la belle vertueuse avec la bénédiction du mari. Comme on le voit, il n'y a pas là de quoi fouetter un chat, fût-il Raminagrobis. Mais il fera pire.

 

En 1674, La Fontaine se lâche complètement. Il publie sa dernière série de contes, où les termes se font plus précis. Les métaphores volent au ras des "toisons", au point qu'une ordonnance de La Reynie, le chef de la police, en interdit la vente. Petit cadeau pour vous, voici une des oeuvres du grand La Fontaine, intitulée "Aimons, foutons".

 

Aimons, foutons, ce sont des plaisirs

Qu'il ne faut pas que l'on sépare ;

La jouissance et les désirs

Sont ce que l'âme a de plus rare.

D'un vit, d'un con et de deux coeurs

Naît un accord plein de douceurs

Que les dévots blâment sans cause.

Amaryllis, pensez-y bien :

Aimer sans foutre est peu de chose,

Foutre sans aimer, ce n'est rien.



 

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commentaires

C
<br /> De muse et rime sont plaisirs<br /> Comme de fleur et d’hirondelle.<br /> Entre elles, n’allez point choisir,<br /> Elles sont, l’une et l’autre, belles.<br /> Cédons à ces deux tentations<br /> Sans leur chercher d’explication.<br /> <br /> Pensez-y donc, mes jeunes muses :<br /> Muse sans rime, un oisif jeu,<br /> Rime sans muse, un faible enjeu ;<br /> Mythes qui nul sage n’abusent.<br /> <br /> <br />  <br />
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L
<br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Merci Cochonfucius !<br /> <br /> <br /> <br />

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